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L’étape de coupe du monde 10 km d’Abu Dhabi a livré son verdict. A l’issue des courses dames et messieurs, quatre nageurs de l’équipe de France ont validé le critère de pré-qualification pour les championnats du monde 2019 sur la distance olympique en se classant dans le top 10. Chez les dames, pour son grand retour en compétition internationale, Aurélie Muller (CN Sarreguemines) termine à une probante 5e place. Chez les messieurs, Marc-Antoine Olivier (Denain Natation Porte du Hainaut), dans le coup pour la gagne jusqu’au bout, se classe 4e, Axel Reymond (AAS Sarcelles Natation 95) 9e et Logan Fontaine (Club des Vikings de Rouen) 10e. Stéphane Lecat, directeur de la discipline eau libre, revient en détails avec nous sur les enseignements à tirer de cette compétition.

Quel est votre premier sentiment à la lecture des résultats ?

Il y a de la satisfaction concernant les garçons, puisque nos leaders ont répondu présent. Marc-Antoine Olivier finit sur la même ligne que les meilleurs nageurs mondiaux de la discipline actuels (Florian Wellbrock, Gregorio Paltrinieri, Kristof Rasovszky). Après une saison rendue compliquée par les blessures, il est de retour à un excellent niveau, même si de son propre aveu il manque encore de puissance et de caisse pour s’imposer. Marco a toutes les qualités pour être champion du monde en 2019, champion olympique en 2020, s’il parvient à prendre en compte dans son quotidien tous les facteurs d’optimisation de la performance. Axel Reymond a réussi une course courageuse, avec un gros retour dans le dernier tour. Je suis content que la balance penche du bon côté pour lui avec cette 9e place, après sa désillusion lors des qualifications de l’olympiade précédente. Avec son entraîneur Magali Merino, ils ont, cette année, su faire évoluer leurs méthodes d’entraînement pour progresser en puissance et en vitesse. Ils doivent poursuivre le travail dans cette direction. Logan Fontaine (10e) a frisé la correctionnelle. Nous avons longtemps cru qu’il était onzième. Il a dû vivre un ascenseur émotionnel important ! Les choses ont basculé du bon côté pour lui aujourd’hui. Malgré un début de saison délicat, il a su trouver des solutions, s’adapter, se mobiliser, pour répondre présent le jour J, une capacité fondamentale dans l’optique des Jeux.

Après une saison 2017-208 marquée par une succession de blessures, Marc-Antoine Olivier est en passe de retrouver son meilleur niveau, celui qui lui avait notamment permis de se qualifier aux Jeux de Rio en 2016 (KMSP/Stéphane Kempinaire).

Quelles leçons tirer de la course féminine ?

Chez les dames, je suis très satisfait de la prestation d’Aurélie Muller, qui n’avait que deux mois d’entraînement derrière elle et qui n’était certainement qu’à 75% de ses capacités. Ce résultat est très prometteur pour la suite. En revanche, je suis déçu pour Lara Grangeon. Elle vient certainement de réaliser sa meilleure course d’eau libre à ce jour et pourtant le « top 10 » lui échappe. Le problème n’est pas l’endurance ou sa qualité aquatique. Elle, comme les autres nageuses de notre équipe à l’exception d’Aurélie, souffre d’un déficit de puissance spécifique pour le 10 km au niveau international, cette capacité à accélérer dans les moments clés de la course. Quand on voit les gabarits des Italiennes ou des Américaines, nos nageuses ne sont pas aussi athlétiques. Il est évident que nos filles doivent progresser physiquement si elles veulent réussir le deuxième critère pré-qualificatif pour les Mondiaux 2019 (des chronos en bassin sur 400, 800 ou 1500 m, ndlr) et être en mesure de lutter avec les meilleures lors des compétitions internationales. Selon une étude de Frédéric Barale, les nageuses du « top 8 » mondial nagent en moyenne 16 minutes 20 au 1 500 m. Nous devons amener nos nageuses vers ce niveau d’exigence chronométrique. Il y a urgence. J’ai la conviction que le travail d’athlétisation peut porter ses fruits en quelques semaines, mais il faut œuvrer dans ce sens, dès demain, les nageuses et leurs entraîneurs doivent en prendre conscience.

En prenant la cinquième place du 10 km de l'étape de coupe du monde d’Abu Dhabi, Aurélie Muller a montré qu'en dépit d'une saison 2017-2018 consacrée à ses études de diététique, elle n'avait absolument rien perdu de son talent pour l'eau libr (KMSP/Stéphane Kempinaire).

Quatre nageurs pré-qualifiés, mais aucun podium. Le directeur de la discipline est-il satisfait de ce bilan ?

Je suis énervé de ne pas voir de nageur français monter sur le podium. J’espère que les nageurs le sont aussi, qu’ils ne se satisfont pas d’un « top 10 ». Nous ne pouvons pas nous permettre ce genre d’absence si nous voulons atteindre nos ambitions de titres olympiques. Les critères de sélection que nous avons fixés reflètent la réalité du niveau international. Les performances d’aujourd’hui sont bonnes, mais perfectibles. Les nageurs doivent intégrer qu’être athlète de haut niveau se vit au quotidien 365 jours par an, pas seulement le temps d’un stage ou d’un été. Dans ce cadre, à nous ensuite de les accompagner au mieux vers la haute performance dans tous ses aspects (physiologique, physique, mental), en faisant appel aux meilleurs experts, afin que nos qualifiés olympiques arrivent dans les meilleures dispositions à Tokyo.

Recueilli par F. L.

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