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Avec 89,0333 et la cinquième place à l'issue de la finale du solo libre des championnats d'Europe remportée par l'Ukrainienne Marta Fiedina, l'Auvergnate repousse ses limites et, tout sourire, ne cache pas sa joie à la sortie du bassin.

Ève, tu étais très souriante dans les bras de ton entraîneur Laure Obry à l'annonce de ton score de cette finale. Pourquoi ?

C'était la surprise car, quand on sort de l'eau, on ne sait pas ce qu'il se passe : les points s'affichent derrière nous, on ne peut pas les voir. J'ai entendu tout le monde crier dans les gradins, j'ai attendu encore, finalement j'ai reçu la note, ce 89 passé, et pffff, ça fait quelque chose ! Cette saison, j'ai grappillé des points à chaque fois et là, j'ai dépassé mon meilleur score. Je me rapproche des 90 et ça fait plaisir. Le travail paie. C'est vrai, j'ai sauté dans les bras de Laure parce que j'ai beaucoup d'affection pour elle. Notre collaboration m'apporte énormément. Je suis hyper contente de ce que je fais avec elle. En la voyant en larmes, je me suis dit « OK, j'ai réussi mon job ». Je le fais pour moi mais je le fais aussi pour toutes les personnes qui me suivent partout : les coaches, la famille, l'équipe, tout le monde. Les voir tous contents comme ça, forcément, ça touche (elle sourit) !

Un mot encore sur ce score : quelle signification a ce 89 ?

Je me rapproche des 90, ça fait quelque chose (elle sourit). Le solo n'est pas une épreuve que je travaille énormément parce que nous mettons beaucoup la priorité sur l'équipe pour les Jeux. Cette année, je l'ai monté avec Virginie (Dedieu), je l'ai travaillé avec Laure ensuite. Voir la note sortir me tenait à cœur parce que ce solo me tient à cœur lui-même pour plein de raisons. Ça y est, le 89 est là et on va continuer à grappiller des points (elle sourit).

Quelle histoire racontes-tu dans ce solo ?

Il s'agit de “N'insiste pas”, de Camille Lelouche. J'avais plusieurs choix de musiques, que j'ai proposés à Virginie et à Laure. Cette dernière m'a fait écouter celle-ci, que je ne connaissais absolument pas. Dès que je l'ai écoutée, en regardant le clip, j'ai été prise car c'est hyper fort. J'ai pleuré. J'ai été très touchée émotionnellement. Je me suis dit que c'était la bonne, que c'était celle qui allait me permettre de transmettre une émotion. Et c'est l'un de mes points forts (elle rit) ! On a foncé, on a essayé. C'est un thème qui parle des violences. Moi, je ne veux pas forcément parler spécialement de celle envers les femmes dans un couple mais de violence en général. Cette année, j'ai rencontré des difficultés, mon premier entraîneur, Vanessa Lamarque, est décédée, c'était compliqué (les larmes lui montent aux yeux). Pour moi, ce solo, c'est aussi la violence de la maladie. C'est un peu un hommage. Chaque fois que je me présente pour le nager, je pense à elle. Chaque fois que j'en sors, je pense à elle. Je sais qu'elle aurait aimé le voir. Du coup, je donne tout pour elle. Cette période s'est présentée au moment où je montais ce solo. Vanessa rêvait que je travaille avec Virginie, en plus...

Dans quelle mesure t'investis-tu dans le solo par rapport aux autres épreuves ?

C'est une épreuve difficile. On est seule et il faut occuper, exploiter tout l'espace, ne pas faire petite dans le bassin, qui est grand. Montrer le maximum, s'imposer le plus possible devant les juges. En plus, on est tout le temps en mouvement, on ne s'arrête jamais. Musculairement, en termes d'intensité, ça prend énormément d'énergie. Et émotionnellement, c'est très fort. On encaisse donc beaucoup de fatigue dessus. Il n'y a pas de temps de pause, contrairement à l'équipe où l'on est parfois sur le dos, où l'on trouve des moments pour “récupérer”. J'aborde le solo d'une manière différente de l'équipe parce que ce n'est que moi. La perf' m'appartient à moi. Finalement, ça enlève un stress. Il n'y a que moi et je donne ce que j'ai envie de donner.

C'est une épreuve qui t'a toujours tenu à cœur, n'est-ce pas ?

Ah oui ! J'apprécie énormément. Ça me permet de penser à autre chose. Quand je présente le solo, je pense plaisir, plaisir, plaisir. « Nage comme tu sais le faire. » Laure me l'a dit avant de passer : « Tu sais faire les choses, vas-y, nage à ta manière ! »

Tu évoquais la barre des 90 points. Quel regard portes-tu sur les meilleures nageuses mondiales ?

Je regarde toujours ce qu'il se passe au-dessus, bien évidemment. Mes concurrentes, mais aussi au-dessus. Il y a quelque chose à prendre dans chaque façon de nager, que ce soit technique ou chorégraphique. C'est hyper intéressant. J'essaie de voir ce qu'il me manque. Avoir quelque chose à regarder donner beaucoup d'informations. Je veux me rapprocher d'elles. On veut aller chercher toujours plus (elle sourit) !

À Rome, David Lortholary

Photos DeepBlueMedia

 

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