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Yohann Ndoye-Brouard a vécu l'un de ces moments suspendus. De ceux qui vous donnent l'impression de voler, ce sentiment d'intouchable qui vous transporte et émeut à la fois vos très proches et votre pays. Médaillé de bronze d'un 100 m dos supersonique, mardi 29 juillet aux championnats du monde de Singapour, l'Annécien de l'INSEP, protégé de Michel Chrétien, a conquis sa première médaille individuelle internationale en terminant troisième du 100 m dos, avec un record de France explosé de 19 centièmes, un record personnel abaissé de 56 centièmes. Plus serein que jamais, conscient de ses forces et de son travail, Yohann Ndoye-Brouard a montré au monde que pour cette olympiade le menant à Los Angeles, il allait falloir composer avec lui. Il s'agit là de la quatrième médaille française de ces Mondiaux, la troisième en bronze après les deux de Marc-Antoine Olivier et au lendemain de l'or de Maxime Grousset. Découvrez ses premières réactions en zone mixte.

 

Yohann Ndoye-Brouard, médaillé de bronze du 100 m dos (51"92 RF) :

"C'est énorme. C'est énorme parce qu'en fait, je parlais de ça avec Florent aux Jeux, c'est dur les courses où il ne faut pas aller à fond dès le début. Il faut rester calme puis accélérer. C'est vraiment ma stratégie de course aujourd'hui, laisser partir les autres, attendre le deuxième 50 m. J'ai un nombre de coups de bras où je sais qu'il faut que j'accélère, mais c'est quand même assez tard dans la course. C'est dur de rester calme jusqu'à ce moment-là, mais je l'ai fait. J'ai voulu accélérer et ça a accéléré. Je savais qu'il se passait un truc de fort, mais je savais aussi que je pouvais être au pied du podium à 51"9. J'ai attendu, j'ai vu sur l'écran qu'une ligne extérieure avait fait podium. J'ai regardé le plot, j'ai vu que c'était allumé et c'est vraiment spécial parce que ça fait trois fois que je regarde ce plot et qu'il n'est pas allumé. Donc pour une fois que je le vois allumé, ça fait vraiment plaisir.

Je n'ai même pas regardé le temps, je m'en foutais je voulais juste être sur le podium. Je l'ai fait, je suis vraiment content parce que j'ai beaucoup bossé. Ces dernières 24h ont été longues parce que je savais que je pouvais le faire, mais à la fois ce n'était pas fait, donc il fallait attendre. Je me suis fait encore tous les scénarios, donc c'était vraiment spécial. Tout s'est relâché quand j'ai vu cette lumière, je l'avais enfin fait.

Je pense que l'expérience a joué. J'en parlais avec Michel et il m'a demandé si je tentais ce soir. J'ai dit non, ce n'est pas moi de partir à fond. Je ne suis pas comme les Russes, je suis plus un nageur de 200 donc c'est sur le retour que je vais les avoir. Aux Jeux je l'ai fait plein de fois, revenir vite et en plus ça crispe les gens à côté de moi quand ils voient de grands bras noirs revenir sur eux, ça les fait un peu stresser, donc depuis que je suis petit j'ai fait ce genre de course, maintenant je le fais à haut niveau et ça me fait monter sur le podium, donc je suis content. J'aurais bien aimé chanter la Marseillaise aussi, mais ça représente déjà beaucoup.

Le 52"30 au début, je ne voulais pas faire ça du tout, je m'étais 52"8 ou 52"9 ça passera, mais quand j'ai vu 52"3 avec ce que j'avais mis, je me suis dit qu'il y avait un truc à faire. C'est sûr que ça m'a galvanisé. Je voulais tenter, voir ce que j'avais dans le ventre, mais Mathieu (Neuillet) m'a dit d'aller doucement, que je n'ai pas besoin de faire mieux, de juste faire ce que j'ai fait en demi-finale et on verra. 

J'aurais aussi pu être quatrième à sept centièmes aussi, donc je commence mon compteur avec une médaille de bronze. Il reste un championnat du monde avant les Jeux olympiques, donc j'aurai le temps de m'améliorer. Il y a le 200 dos aussi en fin de semaine. Je nage relâché, après il ne faut pas que je le sois trop non plus, je me connais (rires). Mais il y a un poids en moins, je l'ai fait. Il y a aussi ce relais 4 nages, Maxime est très en forme, moi aussi. Les autres nations n'ont pas l'air d'être si forts, j'ai battu les deux Russes. Je pense qu'on a un truc à faire, donc je suis impatient de voir ce que la semaine nous réserve.

J'ai à peine célébré que j'ai vu tout un clan avec des drapeaux français, je savais que c'était eux (sa mère, sa sœur et sa grand-mère ont fait le déplacement). Ça fait plaisir parce que je leur donne des émotions. Ma grand-mère, je ne l'aurais pas toute ma vie, je le sais très bien, et elle prend le temps de vivre tous ces moments avec nous. Et lui donner des émotions pareilles, je suis trop content, c'est pour tout le monde que je fais ça. On se donne et on se rend les choses, c'est une machine qui marche bien."

 

À Singapour, Louis Delvinquière

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